Personne ne t'entend crier

Publié le par Maman Libre

Je pense bien que mon entourage l'a compris : en ce moment je passe une énorme crise dépressive.

 

Dépression. Le mot peut sembler fort, très fort. Pourtant c'est malheureusement bien le cas.

 

Si j'ai toujours eu un fond de blues permanent, je m'en débrouille fort bien et ça ne m'empêche aucunement de profiter des menues joies et des grands bonheurs de la vie. Sans aller plus loin que des moments de spleen passager.

 

Il n'empêche, j'ai eu quelques épisodes franchement dépressifs, graves. J'ai plus que songé au suicide. J'ai parfois failli passer à l'acte.

 

J'ai eu des réactions difficilement compréhensibles de l'extérieur. Je pouvais rire et sourire toute la journée, et la nuit venue, dans le noir, quand personne ne voyait, n'entendait, pleurer, pleurer et hurler en silence.

 

 

 

 

J'ai tendance à me considérer comme pessimiste. En effet quelle que soit la situation, j'élabore toujours les scénarios les plus sombres, les plus douloureux, les plus inextricables. Et à partir de là, je cherche les solutions qui pourraient me permettre de sortir de ma situation avant d'en arriver au scénario catastrophe. Et de deux choses l'une : soit je m'en sors, et là, je ne peux qu'en être heureuse et savourer sans obstacle, soit je n'y arrive pas, et auquel cas, je ne peux être déçue, je l'avais prévu, je savais que ça pouvait parfaitement arriver.

 

C'est, j'en suis certaine, cette propension à ne pas me faire d'illusions, à ne pas me croire arrivée avant de l'être, à ne pas élaborer de plans sur la comète, qui m'a permis de survivre jusque là. De ne pas, au dernier moment, faire le geste égoïste que je crois alors si altruiste. Toute personne qui a des pulsions suicidaires, qui est dépressive, a ce genre de pensée : "Le monde/mon entourage/mes enfants se portera/porteront mieux sans moi, je ne suis qu'un fardeau".

 

Or, je me suis préservée autant que possible de céder à ces conneries (oui ce sont des conneries, j'en suis parfaitement consciente), grâce à mon pessimisme. Je SAIS, sans me vanter, que me donner la mort serait détruire pas mal de choses, de monde autour de moi. Et que ça n'avancerait à rien, au contraire. Cela n'empêche pas que je CROIE durant mes épisodes dépressifs, que ce sera le mieux pour tous ceux que j'aime et qui me trainent comme une vieille casserole cabossée.

 

Dans mes épisodes dépressifs, je me dénigre, je fous imaginairement tout en l'air, je ne peux absolument pas m'en sortir, la situation est invivable, je ne peux plus supporter ni me supporter.

 

J'aimerais que ceux que j'aime se rassurent. Dur je sais, avec ce que je viens de balancer.

 

Que mes amis (internautes ou réels), ma famille, soient conscients que leur soutien ne m'est en aucun cas indifférent.

 

Oui, en ce moment je suis en pleine dépression. Je ris le jour, je souris, je papote. Le soir je pleure, et je hurle en silence. Pour que personne ne m'entende, ne me voie. Parce que j'estime que vous ne méritez pas de subir mes maux, bien qu'aujourd'hui à travers mes mots je les expose.

 

Oui, j'ai des envies fortes de suicide, je ne vais pas mentir. Mais non, je n'y cèderai pas.

 

Oui, j'ai peur de ma situation financière, qui met non seulement moi, mais toute ma petite tribu en portafaux, ce qui m'est d'autant plus insupportable. Il m'est insupportable en ce moment de vivre chichement, précairement, de manger de la merde pour que mon enfant puisse juste manger et vivre au chaud et soigné, de ne pouvoir lui offrir plus, le gâter à mort, gâter tous mes proches, qui le méritent tellement.

 

Oui, du coup, j'ai de gros doutes sur le bien-fondé de cette nouvelle grossesse, gouffre financier de plus, l'arrivée de ce bébé qu'il faudra aussi habiller et soigner et nourrir (heureusement l'allaitement exclusif aide, mais pour cela il faut que je puisse bien me nourrir que mon enfant ait tout ce qu'il lui faut). Pour ce qui est de l'aimer, contrairement à ma première grossesse, ça a été immédiat, plus concret dès le départ (pourquoi, mystère). Et c'est l'amour qui me retient de me jeter dans les escaliers pour faire en sorte d'interrompre cette grossesse. L'amour de mon bébé, de mon fils déjà là, de mon homme, de ma famille, ma belle famille, mes amis. Pourquoi me jeter dans les escaliers ? Parce que ça passerait tellement pour un accident, qu'on me plaindrait, qu'enfin je pourrais m'épancher librement, sans le blocage qu'induit ma putain de fierté et ce foutu altruisme, qui fait que je ne veux pas emmerder le monde.

 

Oui ce sont des pensées extrêmement violentes, j'en ai bien conscience.

 

Alors depuis quelques semaines, je vais mal, oui.

 

Je maudis ma timidité maladive (on dirait pas comme ça hein), qui m'a empêchée de faire carrière dans le milieu artistique. Car autant au théâtre je suis à l'aise, autant dans le chant, ce qui, à l'époque (et encore maintenant) était ma grande passion, et faisait ma joie et mes espoirs... J'avais un trac maladif, la trouille qu'on me juge mal, de rater. Alors plutôt que de rater, j'ai refusé les occasions régulières qui se sont présentées à moi. Pas prête, je disais. J'ai bientôt 27 ans et je n'ai jamais accompli le rêve de ma vie. Et il est trop tard, je me suis engagée, j'ai une famille maintenant, que j'aime. Mais ça ne m'empêche pas d'en souffrir et de me détester d'avoir gâché mes chances stupidement.

 

Je me maudis de ne pas avoir poursuivi mes études, ne serait-ce que ce détestable BTS après lequel j'aurais du, je le sais, faire une licence pro, histoire de trouver un boulot qui paie correctement et qui soit stable. Trop tard aussi. Pour ça, je me déteste chaque jour, de ne pouvoir apporter un semblant de stabilité financière à mon foyer.

 

Je me maudis d'être pétrifiée à l'idée de me retrouver au volant d'une voiture, ce qui m'empêche de passer mon permis, et donc d'accéder à des boulots où on n'embauche que si tu as le permis (même pour faire des ménages dans une agglomération ultra bien desservie en transports en commun, un comble). Je me déteste, et j'ai honte, tout le monde autour de moi l'a, personne n'en fait tant d'histoires et de chichis. Et moi la trentaine approchant, j'ai peur comme une pauvre conne.

 

J'ai peur de l'accouchement à venir, qu'on force la césarienne, qu'on ne me laisse pas ma chance, d'échouer à nouveau, comme j'ai échoué à mettre mon fils au monde comme il le méritait.

 

J'ai peur du baby blues, peur de faire une dépression post partum ou un burn out, et donc d'abandonner ma famille à un moment crucial.

 

Ma peur et ma timidité m'ont handicapée depuis toujours, et ça continue. Je suis incapable d'en sortir et incapable tout autant de prendre ce problème à bras le corps.

 

Voilà donc mon constat d'échec, et tout le soutien du monde n'y changera rien. Ce sont les faits, crus et violents, comme les pensées que je vis en ce moment.

 

Mais comme je l'ai dit plus haut, j'aimerais que ceux que j'aime se rassurent : je ne passerai jamais à l'acte. Je vous aime trop pour vous imposer toute cette merde.

 

Aujourd'hui je touche le fond. Et c'est un mal nécessaire. Demain, dans une semaine, quelques mois, depuis le fond, je reprendrai mon élan, je sortirai la tête de ce marasme puant de la dépression. Je m'en sortirai. Pas indemne mais vivante, heureuse d'être là, prête à croquer la vie à pleines dents, fière d'en être revenue, soulagée et apaisée de mes douleurs et de mes doutes. Légère comme l'air, insouciante et rayonnante.

 

À partir des faits que j'ai énoncés, il ne me reste plus qu'à élaborer, encore et encore, mes habituels scénarios, et de prendre la responsabilité de trouver les solutions, tout en étant en phase avec mes peurs, tout en ne me brusquant pas, inutile de risquer de faire un blocage si je peux y arriver autrement. Dussent les solutions me décevoir, moi. Tant que ma famille et mes proches vont bien, peu importe ce que moi je pense.

 

Je vous aime, tout ira bien, n'ayez crainte.

Publié dans Dans ma tête

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
L
J'ai fait 10 ans d'analyse et je vais nettement mieux même si je reste "fragile" et que j'ai peur de tout, notamment de conduire. j'ai quand même réussi à avoir le permis, mais je ne conduis pas,<br /> la simple idée de devoir prendre le volant me déclanche des crises de paniques : la peur d'avoir peur...(et un peu peur d'être trop tentée de me foutre en l'air. donner une arme à un dépressif,<br /> c'est pas une bonne idée...) Mais je crois qu'une partie de moi à envie qu'il en soit ainsi, a envie de se laisser porter et de ne pas se prendre en main (ce que la conduite symbolise bien sûr)<br /> Bref, bon, tu ne penses pas à consulter ? Sinon, c'est sans doute placebo, je ne sais pas, mais les fleurs de Bach me donnent un coup de main dans les moments difficiles. Bon courage !
Répondre
M
<br /> Bonjour Gaelle !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Merci de ton message, tres sympa et encourageant ;)<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Ne t'en fais pas, je vais m'en sortir, je touche le fond, puis je rebondirai.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je suis contente que tu sois plutôt une optimiste, tout le monde ne peut pas être pessimiste, sinon le monde serait triste, non ?<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je pense que chacun a sa dynamique, mais je ne sais pas si je peux avoir une dynamique positiviste, car, globalement, mon pessimisme m'a souvent permis de ne pas me noyer et de trouver<br /> efficacement des solutions à de nombreux problèmes, plus ou moins grave, de trouver une force en moi. C'est un peu un auto-coup de pied au cul, si tu veux :)<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> En tout cas je vais songer à tout ce que tu me dis dans ton commentaire très complet. Par contre, je suis loin du finistère, et chéri étant basque amoureux de son pays basque, déménager si loin<br /> est pour lui inenvisagable ^^ Et j'ai beau être une bosseuse (deux ans de ménages, six ans de mcdo au compteur), je ne crois pas être capable de bosser dans un élevage dont les animaux sont<br /> rarement bien traités et finisent à l'abattoir. Je lutte contre la maltraitance et le statut d'objet de l'animal, pour le respect de ces êtres, donc j'ai du mal avec tout ça, c'est en partie ce<br /> qui a motivé ma démission de mcdo.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bien entendu, loin de moi de critiquer ceux qui bossent dans les abattoirs et élevages intensifs, la plupart du temps, je sais bien que ce n'est pas un choix, et il faut nourrir sa famille.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> En tout cas merci pour cette touche d'espoir que tu m'envoies ;)<br />
Répondre
G
<br /> Je suis plutôt sur l'autre versant, celui qui essaie de voir le bon côté des choses. Oui c'est pas toujours marrant, même si je ne partage pas les mêmes soucis que toi, et oui on s'accroche, en<br /> espérant que ça ira mieux demain.<br /> <br /> <br /> Je me dis qu'il y a toujours une solution à un problème, même si on ne la connaît pas, même si on ne l'imagine pas. Toi, un de tes problèmes, c'est peut-être de te sentir seule avec tes<br /> sentiments. Pas totalement seule, puisque via ton blog, tu peux les faire partager. Parfois, tout ce dont on a besoin, c'est une oreille attentive où s'épancher. Qulequ'un qui puisse se contenter<br /> d'écouter, et compatir avec toi. Te dire: oui, tu te sens mal, je le reconnais, je le vois, tu te sens mal, tu as le droit de te sentir mal. Notre société voudrait qu'on aille tous bien, mais ce<br /> n'est pas possible. On se sent parfois mal, et on en a le droit.<br /> <br /> <br /> Parfois, cela aide d'avoir quelqu'un qui te dit: mais si, c'est possible, à 27 ou 30 ans ta vie n'est pas finie, tu n'en es même pas à la moitié, tu as encore le temps de progresser sur toi-même,<br /> il n'est jamais trop tard; de passer le permis, de trouver un métier qui te conviendrait (je ne sais pas où tu es, mais en Finistère on recrute des personnes motivées, même sans expérience, pour<br /> travailler dans les élevages de porcs ou les élevages laitiers. Il y a sûrement d'autres pistes, tu trouveras sûrement la tienne). Quelqu'un qui te dise: aie confiance en toi, tu en es capable,<br /> moi j'y crois, quand tu y croiras aussi tu vas y arriver. C'est ce que j'ai dit à ma fille et regarde, elle fait du vélo toute seule, enfin. Bon ok c'est peut-être pas très sympa comme<br /> comparaison... mais quand tu as confiance en toi, quand tu reprends confiance, tu arrives à faire des choses.<br /> <br /> <br /> Là, tu passes par un moment très difficile, tu en es consciente, tu sais sans doute déjà que c'est un moment difficile qui aura une fin. Tu aimes ta famille, tes proches, et leur soutien t'aide à<br /> continuer. Tiens bon, ça va aller mieux. La vague va passer, tu ressortiras la tête de l'eau, tu te sentiras à nouveau capable de faire des projets, d'envisager l'avenir.<br /> <br /> <br /> La "pensée positive", cela m'a aidée. Se lever le matin en se disant "aujourd'hui, ce sera peut-être mieux qu'hier, je me sentirai mieux et la journée *peut* bien se passer", c'est un peu idiot,<br /> mais ça aide le cerveau à se sortir de l'ornière. Cela nous donne le droit de se sentir mieux. De ne pas se focaliser sur le "pas bien" mais sur le "mieux", aussi petit soit-il, aussi lointain<br /> semble-t-il.<br /> <br /> <br /> D'ailleurs en me relisant... ça transapraît un peu, non? :-)<br />
Répondre